Elias Abi Chacra, quelle histoire !

Il est Ethiopien, il a contribué à écrire l’histoire de la Ligue pendant 24 ans. Et pas seulement…. Il fut l’élève d’Ohshima, il est 6e Dan, titulaire d’un doctorat en géographie, correspondant du Point… Elias Abi Chacra, le chakra du Karatéka…

 

Elias Abi Chacra appartient à un temps que les moins de 20 ans ne connaissent pas. Pourtant, ils lui doivent beaucoup. Le Karaté lui doit beaucoup. Cette année, il s’est même vu décerné par l’Empereur du Japon la médaille d’or de l’Ordre du Soleil Levant pour son implication dans le Karaté.

Né à Adis Abeba en 1949, il arrive en France en 1971, pour suivre des études supérieures à l’Université d’Orléans. Son sport en Éthiopie ?… L’athlé. Il est même champion et recordman scolaire du poids et du disque. Mais… « Ma grande déception en arrivant a été de voir qu’il n’y avait pas de stade à La Source. Ça m’a complétement démoralisé », raconte-t-il. « Heureusement pour moi, il y avait un club de Karaté universitaire ».

C’est l’époque de la vague Bruce Lee, c’est la grande découverte pour Elias. « La 1ère année, j’ai regardé avec un peu de peur parce ça gueulait, ça cognait… », rigole-t-il. « La 2e année, par hasard, lors d’une promenade, je rencontre un copain qui voulait vendre son kimono. C’était un kimono de Judo ! La veste m’arrivait au-dessous de mes genoux ! Bon, je l’ai gardé un an ».

Elias obtient sa ceinture noire en 1978, « le 13 décembre », se souvient-il. « Mais ce qui a changé ma vie, c’est de rencontrer Maître Ohshima en 1979. Il a totalement changé ma vision du Karaté. C’est le 1er expert à amener le Karaté aux USA. Il avait une pédagogie exceptionnelle. Il nous a appris une chose : à respecter notre corps, à le ménager. Ce n’est pas notre cerveau qui nous amène le plus loin possible mais notre corps ».

Titulaire d’une maîtrise de géographie (1977) puis d’un doctorat (1985), il est l’un des premiers de la Région à obtenir son Brevet d’État, 1er puis 2e degré. Dès 1985, il intègre l’école des cadres de la Ligue TBO, s’investit énormément, au niveau régional comme national. En 1993, Alain Auclert lui propose de prendre la direction de l’école. Il restera 16 ans en poste, jusqu’à son retour en Éthiopie en 2009. « Mon parcours de Karaté a été influencé par la Ligue et, de mon côté, j’ai aussi influencé la Ligue », résume-t-il. « Je ne remercierai jamais assez Alain, quelqu’un de droit et très honnête ».

5e Dan en France (6e en Éthiopie), Elias est toujours très investi dans le Karaté. Outre son club qu’il a ouvert dès son retour au pays, il est également responsable national des passages de grade. « J’ai 74 ans et je m’entraîne 5 fois par semaine entre 45 min et 1 h. En tant que responsable, je me dois de montrer l’exemple. C’est une chose fondamentale en Karaté. En Éthiopie, les Arts Martiaux marchent du tonnerre mais il y a un énorme problème de salle. Je crois à une chose : la formation des cadres. Pour le moment, on est bouffé par le Taekwondo mais on va les coincer. Ils ne me connaissent pas ! », sourit-il. « Cette année, on a organisé un entraînement avec 260 personnes ».

L’an passé, Elias est aussi retourné à ses premiers amours en fondant un club d’athlétisme, les Panthères Noires. « Je m’ennuie en tant que vieux retraité », éclate-t-il de rire. « J’espère, qu’un jour, on entendra parler de mon club. Le Karaté m’a appris une chose, c’est de ne jamais perdre espoir, jamais », assure le correspondant du magazine Le Point. « Le dernier article portait sur le Nil. Comme je suis géographe, c’était un sujet facile ». Chapeau bas, Senseï.

 

Ludovic Mauchien