Louis-Gabriel Ramarozatovo : “Dans chaque karatéka, il y a un kobudoka qui s’ignore !” (2/2)

Suite de notre entretien avec Louis-Gabriel Ramarozatovo, pratiquant de karaté et kobudo, qui nous parle dans ce deuxième article du lien entre les deux disciplines mais aussi des différences et complémentarités. (Relire la première partie)

  • Pourquoi pratiquer le karaté et le kobudo ? 

De nombreux hauts gradés en karaté pratiquent d’autres disciplines en parallèle à des degrés moindres, comme complément. Pratiquer ces deux disciplines, c’est s’intéresser aux arts martiaux mais sans toutefois s’éparpiller.La plupart des experts okinawaiens de karaté pratiquent à des degrés divers au moins une arme de kobudo.

  • Quels sont les liens entre ces deux disciplines ?

La pratique du Kobudo peut sérieusement enrichir la pratique du karaté par le relâchement qu’il implique dans le maniement des armes, le travail sur la distance, le rythme et le contrôle de l’arme lors des applications avec partenaire. Le Shotokan nous a permis d’appréhender plus vite la notion de kimé en kobudo que bien souvent des pratiquants d’autres styles de karaté. Le Kobudo nous a fait comprendre mieux l’importance de la décomposition des mouvements (travail technique lent), la fluidité dans les mouvements, le relâchement, le travail plus prêt du corps, l’importance du travail à deux et la confiance envers son partenaire.

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  • Quelles sont les similitudes mais aussi les différences dans ces deux pratiques ? 

La pratique du karaté se fait par définition à mains nues. Celle du Kobudo se fait avec une ou des armes en main. Le kobudo est donc pour moi “une extension” du karaté.  Dans la pratique du Kobudo, il est toujours intéressant pour un enseignant de savoir observer le comportement des débutants, surtout s’ils sont pratiquants de karaté depuis plusieurs années !

Dans l’enseignement des techniques de karaté pieds/poings, le pratiquant « initié » comprend vite l’importance des chaînes de transmission entre la qualité de ses appuis/encrage au sol et les groupes musculaires utilisés. La relation sol/cheville/genou/hanche/tronc pour aboutir au poing dans le cas d’un tsuki. La notion de tension et de relâchement …

La première arme abordée en kobudo est le baton long ou Bo (1,80m). Dans 50% des cas, le pratiquant kobudoka novice est déstabilisé. Il perd sa synchronisation des déplacements et focalise sur « cette extension anormale » de ses bras et de fait oublie ses jambes, il ne sait plus se déplacer naturellement. La première étape de l’enseignant est donc de lui « réapprendre » à marcher.

Avec les pratiquants de karaté confirmés, la notion du déplacement du kimé demande parfois plus de temps que la logique ne le voudrait. Ils restent dans leurs acquis de karatékas et tentent de travailler vite et fort beaucoup trop tôt. Dans la pratique des armes, le kimé doit se trouver à l’extrémité de l’arme, dans le cas du bâton il est donc déplacé d’environ 60cm par rapport au poing du karatéka. Cette règle est valable pour toutes les armes utilisées et le kobudoka doit être en mesure d’adapter sa recherche de kimé non seulement en fonction de l’arme utilisée mais également par rapport à la manière dont il l’utilise (pommeau du saï ou pointe, coté court ou long du Tunkwa, etc…).

Pour les armes flexibles (Nunchaku, Sansetsukon, kamas/ficelle, Suruchin …) La difficulté supplémentaire est en outre de trouver le « point de kimé » dans un mouvement circulaire ou elliptique et sans que le pratiquant se mette lui-même en danger. Tout débutant dans la pratique du Nunchaku connaît l’effet déplaisant d’un retour du nunchaku sur l’arrière du crâne. Dans ce cas le travail du corps est beaucoup plus accentué qu’en karaté. Le travail au niveau du buste et du bassin est important aussi bien dans la recherche de puissance qu’en absorption du mouvement après la frappe.

  • Est-ce que ces deux disciplines sont complémentaires ? 

Tout à fait. Les déplacements sont identiques, les techniques de base sont exactement les mêmes, elles ne sont que l’adaptation à un type d’arme et à ses possibilités. L’étude des armes se fait de manière progressive. D’abord les armes rigides (Bo, Tonfa, sai), puis les armes à une articulation (Nunchaku) puis à 2 articulations (Sanstsukon) et enfin les autres pour les plus gradés.

La recherche martiale et les règles d’évolution sont les mêmes. Notre pratique des 2 disciplines nous montre que la progression dans l’une entraîne la progression dans l’autre, mais il faut être disponible, pour ajouter des heures d’entrainements à son programme, et ne pas faire l’erreur de privilégier une discipline au détriment de l’autre.  Le kobudo est encore une discipline inconnue, c’est pourquoi nous encourageons les karatékas qui le souhaitent à venir la découvrir.

Dans chaque karatéka, il y a un kobudoka qui s’ignore !

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  • Qu’est ce qu’apporte le kobudo à votre épanouissement personnel ?

Le travail des armes nous fait comprendre que celles ci deviennent une partie inséparable du corps et cela demande donc une recherche de maitrise parfaite, pour soi d’abord, mais pour le partenaire aussi. C’est une formation de soi qui donne de la confiance.

  • Racontez nous une anecdote dans cette pratique ?

Ce qui m’a le plus marqué, c’est d’abord la bonne ambiance dans laquelle les stages se déroulent, autant ceux de Rennes à mes débuts avec Senseï Chinen et Monsieur Ledy, que ceux annuels ou nous allions tous avec Mr Dumont à Thonon-les-bains pendant une semaine en Juillet. J’ai aussi été autorisé avec Mr Dumont à suivre les stages nationaux spécifiques professeurs. En tout je faisais 5 stages annuels. Ma progression personnelle s’en est fortement ressentie.

Sinon par défi personnel et pour me mesurer aux autres, à partir du 2ème dan en kobudo, j’ai été surpris de mes performances lors des coupes de France de Kobudo (Oshukai). En effet, finir 1er aussi bien en équipe qu’en catégorie individuelle puis open en katas comme en oyo (application libre à 2) et ce pendant 3 années, prouve bien qu’avec le travail sous la direction de mes Sensei, que rien n’est impossible.

Si vous voulez nous rejoindre ou vous initiez à cette discipline, rendez vous le site internet de notre association www.torashindo.com

JEANLOUIS